ARÉNA DE CAP-AUX-MEULES, ÎLES-DE-LA-MADELEINE
Le Centre d'archives régional des Îles s'est intéressé à l'histoire de la construction de l'aréna de Cap-aux-Meules après plusieurs demandes d'information la concernant.
Pour en savoir plus sur ce bâtiment à l'architecture originale, plusieurs sources d'archives furent dépouillées et personnes furent rencontrées durant l'été 2020. Nous nous sommes limités à la première partie de l'histoire de l'aréna, celle de l'époque des Leslie.
BREF HISTORIQUE SUR LES LESLIE
Frank
Willoughby Leslie, fils de William
Gasper Leslie II et Alice Burke, est né à Cap-aux-Meules le 6 novembre 1883 et est baptisé le 27 février 1884 à l'église St-Luke. Il est décédé en 1964 à Halifax. Sa
famille apparait sur le recensement de la paroisse de L’Étang-du-Nord, en 1891,
alors qu’il a 9 ans. Son père William fut un des premiers et des plus grands
entrepreneurs des Îles. Les Leslie sont originaires de Württemberg, en Allemagne. William Gasper Leslie II eut une très longue lignée de par ses deux mariages. Sa première épouse est Victoire Boudreau (à François et Suzanne Turbide). Ils se marient à l'église St-Luke le 1er janvier 1876. Devenu veuf, il épouse Alice Burke (à John et Jane Pagan).
L’entreprise
sous le nom de William Leslie & co délivrait les contrats postaux
pour le Gouvernement, tenait des magasins de marchandises d’alimentation, de
médicaments et de la fourniture pour les pêcheurs et ses propres usines de
pêche établies sur pratiquement toutes les Îles. Grâce à l’influence du cousin
de son père, le député Robert Jamieson Leslie (fils d’Henry Godfrey Leslie), le
nom de sa famille est resté associé à la toponymie de nombreuses entités :
Bureau de poste Leslie, Leslie Cove (anse située à Cap-aux-Meules). L’Anse
Leslie, sur le côté est du port fut nommé en son nom, de même que le cap qui
domine le port. La photo ci-haut, montre les installations près de la
résidence des Leslie à Cap-aux-Meules.
William
Casper Leslie II est décédé à Halifax en 1924 et fut inhumé au cimetière
anglican de Cap-aux-Meules. Après son décès, c’est son fils Frank Willoughby Leslie, qui reprit les rênes de l’entreprise.
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Pierre tombale située au cimetière St-Luke à Cap-aux-Meules. Photo Jean-François Petitpas. |
Robert
Jamison Leslie fut député des Îles-de-la-Madeleine et partenaire dans Leslie,
Hart & Co., ainsi qu’actionnaire de la Magdalen Island Steamship Co., Ltd.
Il périt lors du naufrage du Lunenburg en 1905.
Quand Roland Chalmers Leslie [2] est né à Cap-aux-Meules, le 8 novembre 1912, son père Frank avait 29 ans et sa mère Isabel St-Clair Stewart, 24 ans. Roland Chalmers a épousé Tena Benita Buck le 17 août 1937 dans sa ville natale. Ils ont eu dix enfants en 17 ans. Il est décédé à Dieppe, au Nouveau-Brunswick, le 8 mars 2000, à l’âge de 87 ans.
[2] Le nom de Chalmers est à l'origine Chambers dans les registres, en l'honneur du Révérend Chambers. Une recherche du généalogiste Dennis M. Boudreau permet de retracer ces modifications de noms ainsi que l'origine des Chambers.
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Nous en
savons plus sur l’histoire ayant conduit à la construction de l’aréna, en
discutant avec les enfants de celui qui sera le contremaître principal des
travaux : À la demande soutenue de son fils Roland Chambers [2] (nommé
communément Bunny par les anglophones des Îles et prononcé Banney par ses amis
francophones), Frank W. Leslie fournit les fonds nécessaires à la construction
d’une première aréna aux Îles. Ce financement n’est venu qu’après un défi lancé à son fils, de trouver un constructeur aux Îles.
Bunny est
commis voyageur et, comme les autres membres de la fratrie, n’obtient pas plus
de faveurs de son père qui les élève sans gâteries. Raymond
F. Gaudet, ami tenu en très haute estime par Bunny, fut désigné pour ce
travail. Son expérience de construction aux Îles et dans des chantiers d'Halifax avec un de ses oncles, Harold Verge, pesait dans la
balance. Mais c’est
une mémoire exceptionnelle et sa grande capacité d’analyse qui le rendait apte
à relever un tel défi. Après une simple visite d’arénas similaires en
Nouvelle-Écosse, Raymond F. Gaudet conçoit les plans sur une grande table de la
maison.
La
construction presque entièrement faite de planches doit être érigée en
l’absence de toute machinerie de levée. Raymond F. Gaudet effectue lui-même les
calculs de niveau de sol, des dimensions des socles de béton sans l’aide d’arpenteur
ou d’outils modernes de calcul. Les arches sont directement bâties à terre, des
planches sciées manuellement avant d’être montées les unes à la suite de l’autre
pour constituer le toit. On aurait sans doute pu entendre une mouche voler le
jour de la levée des trois premières arches. Raymond F. Gaudet a pu soupirer de
soulagement après l’opération qui consistait à planter trois longs poteaux et y
installer un palan couché vers la route principale.
Monsieur
Gaudet fut par la suite responsable de la construction du bâtiment et de
l’installation et l’entretien de la Gorton Pew. Son talent est tel qu’il
parcourt les États-Unis et le Canada dans le cadre de ses fonctions dans
l’entreprise. Son fils dit détenir encore une coupure de journal montrant son
père recevant un diplôme honoris causa en ingénierie, alors que son père, né en
1912, n’a pu suivre qu’une 5e année d’études. La correspondance
reçue ensuite par son père sera souvent suivie du titre d’ingénieur.
Outre
l’aréna, l’usine de la Gorton Pew et les premiers bâtiments situés sur la Place
des gens de mer, Monsieur Gaudet a également construit des bâtiments encore
existants comme le premier édifice du Ministère des Transports du Québec, le garage Irving et de nombreuses maisons aux
Îles-de-la-Madeleine.
UNE CONSTRUCTION HORS DU COMMUN AU CŒUR DE CAP-AUX-MEULES
UNE ÉQUIPE SUPERVISÉE PAR RAYMOND F. GAUDET (À
Félix)
1. ?
2. Léo Petitpas
3. Augustin dit Dicky Gaudet (frère de
Raymond)
4. Possiblement Pierre D. Leblanc
5. Flavien Gaudet
6.
?
7.
?
8. Ephrem Gaudet
|
9.
Gérard T. Boudreau
10.
Edwin Huet
11. Alphonse Boudreau
12. Raymond F. Gaudet, contremaître
principal
13.
Cyrice Cyr
14.
Raymond D. Cyr
15.
?
|
Si des personnes reconnaissent les inconnus de la photo, merci d'en informer le Centre d'archives régional des Îles. Ceux surlignés en jaune ne sont pas identifiés de façon définitive.
Le 19 janvier 1954, ouverture de l’aréna à Cap-aux-Meules.
C’est avec une partie de hockey de ligue intermédiaire
mettant en compétition « Les Flots » de L’Étang-du-Nord et l’équipe « Notre-Dame »
de Fatima, que l’aréna est inauguré. – La Boussole, janvier ou février 1954, p.6
Le bâtiment put également servir à la tenue de l’événement du
Bicentenaire acadien réunissant des milliers de personnes pour la
reconstitution historique (pageant) présentée le 31 juillet 1955.
Le bâtiment
fut sauvé in extremis un hiver, vers 1961, lors de l’incendie
de l’hôtel Abeerdeen (nommé aussi Hôtel Gaudet) ; le
bardeau d’asphalte côté sud était en partie fondu. L’usage d’une souffleuse à
neige a protégé l’édifice. Cet incendie a détruit plusieurs bâtiments du
village de Cap-aux-Meules.
|
Photo: Collection Alpide Cyr
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Vue du chemin du Quai, vers la fin des années 1950, à
Cap-aux-Meules, en face duquel fut érigé l’aréna.
On distingue au centre le Mistral devenu bureau de C.T.M.A.
ainsi que l’ancienne Banque Nationale, située en avant de l’aréna. Le
restaurant Paul Bourque est sur le coin gauche. À droite de la rue principale l’Hôtel
Aberdeen qui fut détruit par le feu en 1961.
À droite de la sortie du chemin du Quai se trouve la première
centrale électrique de la Coopérative d’électricité des Iles et, un peu plus
loin, le garage Clarke ainsi que les réservoirs de pétrole de Esso Impérial.
Leur présence n’est pas étrangère au fait que l’un des fils de Frank Willoughby,
soit Gerald Stewart Leslie, était agent pour l’Imperial Oil.
VOCATION
DU BÂTIMENT APRÈS 1965
Une partie du
bâtiment servit de loyer et de station de service de taxi pour Antoine Vigneau.
Durant les années 1970, il abritait l’hôtel de ville de Cap-aux-Meules,
qui avait racheté l’édifice mis en vente par le Syndic des Leslie en 1965.
PROJET DE REVITALISATION EN 2011
Des plans de revitalisation de la rue Principale de
Cap-aux-Meules ont permis en 2011,
de maintenir l’usage du bâtiment pour des activités minimales de conservation jusqu'à la démolition ultime en octobre 2020. Le Centre
d’archives régional des Îles a limité ses recherches historiques aux années
reliées au propriétaire initial, Roland Chalmers dit Bunny Leslie et aux
efforts déployés par les ouvriers dirigés par Raymond F. Gaudet, un ingénieur-né,
pour une construction rurale exceptionnelle.
Le
Radar, 15 décembre 2011